Il est bien vrai que certains constructions philosophiques sont condui-
tes à
partir d’une “intuition philosophique” fondamentale, mais tel n’est
pas le cas de
Leibniz. Il semble que l’approche la plus prometteuse d’une
lecture de Leibniz
soit de reconnaître que ses problèmes et termes clefs
sont différents, et
pourtant analogues à certains niveaux de son discours (A.
Funkenstein, 1995, Théologie et imagination scientifique, p.
110).
En prenant ce constat comme point de départ, j’insiste sur le fait que je
ne veux
pas dans ce qui suit rendre compte d’une ‘intuition’ fondatrice des
rapports
entre l’un et le multiple, mais qu’au contraire je souhaite pluraliser
la
dialectique de ces concepts à des niveaux extrêment différents, séman-
tique,
ontologique, épistémique, en ayant présent à l’esprit qu’une certaine
méthode
démonstrative fournit le ressort analogique qui permet d’articuler
ces
niveaux.
On a pu soutenir récemment que le tournant monadologique s’était ac-
compagné
d’un abandon de la méthode démonstrative en métaphysique.1
On a pu d’autre part insister sur la structure architectonique du texte
leib-
nizien qui serait structuré non par des axiomatiques, mais par des
disjon-
ctions conceptuelles.2 C’est devenu pratiquement une idée reçue que
Leib-
niz ayant pris la mesure de son échec caractéristique serait revenu ou
par-
venu à un style philosophique dépourvu de prétention démonstrative. II
est
piquant de constater que cette idée s’est imposée et continue à
s’imposer
alors que des logiciens et des métaphysiciens s’intéressent extrêmement
à
reconstruire axiomatiquement la Monadologie. -
s’entêteraient-ils à cher-
cher des fantomes d’axiomatiques ou à coucher ce
texte, écrit pour fournir
des thèmes à un poète, sur un lit de Procuste?
On essaiera donc de répondre à la question suivante: la Monadologie est-
elle axiomatisable? L’enjeu est le suivant: ce qu’on
appelé le “tournant mona-
dologique” marque chez Leibniz l’émergence d’une
théorie radicale des uni-
tés. Or la Monadologie qui
expose cette théorie est agencée suivant un ordre
qui évoque et refuse à la fois
l’axiomatique. Les paragraphes semblent énon-
cer des thèses qui s’enchaînent et
pourtant nulle démonstration - les thèses
principales sont même énoncées ex abrupto. Si l’on définit un ordre axioma-
tique comme le
fait de distinguer définitions, axiomes et théorèmes et d’indi-
quer
explicitement les axiomes utilisés dans la démonstration des théorèmes,
on peut
se demander quelle est la relation avec l’ordre monadologique qui
consiste dans
une remontée au simple suivie d’une descente vers le composé.
L’axiomatique leibnizienne se distingue de l’axiomatique euclidienne
(et plus
généralement antique3) par la réduction des axiomes aux
proposi-
tions primitives, identiques. On peut donc distinguer deux
mouvements
distincts: la Résolution des axiomes en propositions identiques et la
Dé-
duction des théorèmes à partir des axiomes. Je pose l’hypothèse
suivante
pour l’interprétation de la structure déductive cachée de la Monadologie: la
Montée du composé vers le simple, du
multiple à l’unité, correspond dans
l’ordre monadologique à la résolution dans
l’ordre axiomatique et la Des-
cente du simple vers le composé correspond, de la
même manière, à la dé-
duction, suivant cette analogie:
↓Résolution = Déduction ↓
↑Montée Descente ↑
L’ordre axiomatique n’est pas un ordre des raisons qui viendrait agen-
cer des
contenus déjà constitués mais l’image d’une générativité métaphy-
sique à
l’oeuvre dans la production de ces contenus - il y a un idéalisme
spécifique de
l’axiomatique, présent dans la tradition néoplatonicienne, de
Proclus à Nicolas
de Cues et dans une certaine mesure Weigel.4 Parmi les
commentateurs
d’Euclide, Leibniz s’estime le plus proche peut-être de Pro-
clus,5 car
il avait démontré plusieurs axiomes d’Euclide,6 mais plus profon-
dément encore paree que pour Proclus
l’axiomatisation permet de mettre
en pleine lumière l’engendrement des êtres
géométriques (point, ligne, sur-
face, volume) doués d’une objectivité idéale. De
plus Proclus avait insistè
sur le rôle de l’imagination dans la production des
êtres mathématiques
comme le soulignait Piccolimini (1523-1607):
Ainsi Proclus dérive de Platon l’idée suivant laquelle que les êtres
ma-
thématiques (res mathematicae) sur lesquelles portent les démonstrations,
ne sont ni
des êtres sensibles dans un sujet, ni entièrement libres de lui,
mais que ces
figures mathématiques (figurae mathematicae)
sont formées
dans l’imagination, l’occasion
en étant fournie par la matière sensible.7
Il s’agit ici d’une thèse familière à Leibniz. Plus profondément encore la
fé-
condité des axiomes, sources de la multiplicité dérivative des théorèmes
est
une image de la production originaire à partir de l’un - principe des
héna-
des et monades dérivées (ou dérivatives):
C’est parce que l’infini existe éternellement dans l’intelligence comme
puissance
génératrice des êtres étendus qu’il en est venu à être puissance
chez ces
participants, car l’infinité est chez les intelligibles cause première
et cause
féconde de tous les êtres, tandis que chez les êtres engagés dans la
matière elle
est imparfaite et n’est totalité des êtres qu’en puissance (In Eucl., p. 88).8
Pour Proclus la raison dianoétique peut se penser comme “multiple sous la
loi de
son altérité” et donne naissance à l’arithmétique,9 tandis que si
elle
se pense “sous la loi de l’unité de sa multiplicité” elle donne naissance à
la
musique. De même quand “la raison établit son activité sous la loi du
repo-
s” elle donne naissance à la géométrie, alors que si elle “établit son
activité
sous la loi du mouvement” elle “émet la science des corps célestes
[astrono-
mie]” ( In Eucl., pp. 36-37).
Ceci peut être mis en rapport avec la platonisme de Leibniz, ou plus
exactement
la néo-platonisme de Leibniz, si on entend par là la volonté
concordataire
d’harmoniser Aristote et Platon. Pour Proclus les raisons ma-
thématiques ont
dynamiques:
Substantielles et automotrices sont les raisons mathématiques qui em-
plissent
les âmes, car ce sont les raisons que la fonction dianoétique projette
et déroule
pour constituer la variété entière des sciences mathématiques (In
Eucl., p. 17).
On ne peut ici exposer en détail cette orientation génétique de la philoso-
phie
proclusienne des mathématiques, mais il est certain qu’elle met l’ac-
cent sur la génération des êtres mathématiques, arithmétiques d’abord,
géo-
métriques ensuite. Pour Proclus, comme pour Leibniz, la méthode
axioma-
tique peut être ré-appliquée, ceci précisément en vertu de son
caractère
génératif.
Quelle forme prend cette générativité métaphysique à partir de l’un, à
partir de
la simplicité? Création? Emanation? Ce qui peut paraître un dou-
ble langage ou
une hésitation de Leibniz peut être réinterprété à la lumière
de ce qui précède.
L’émanation est isomorphe à l’ordre axiomatique, c’est
ce qui explique son
caractère inéliminable. On réexaminera ce point, mais
auparavant un long détour
est nécessaire, on commencera donc par se de-
mander s’il y a une structure
euclidienne sous-jacente ou axiomatique au
sens leibnizien de la Monadologie, ce qui réclamera qu’on rappelle briève-
ment
ce qu’est cette axiomatique leibnizienne et son application possible ou
pas à la
métaphysique (lere partie); ensuite nous examinerons les
problèmes
que pose une axiomatisation de la Monadologie
(définition de la monade
etc.), en présentant de manière succincte des
axiomatisations récentes à l’in-
térieur d’ontologies très diverses (méréologie,
théorie des guises, théorie des
objets) 2eme partie).
Enfin nous reviendrons à cette question de la nature de
la déduction métaphysique
en examinant la structure émanationiste particu-
lière de la Monadologie (3e partie).
On peut apercevoir la différence entre une axiomatique sous-jacente
d’un texte et
sa présentation dans les décalages que nous mettons en lu-
mière lors d’une
reconstruction,10 décalages dont on trouve un exemple
frappant dans cette remarque de
Belaval:
ce que nous avions pris pour le début
de la Monadologie
dans l’ordre des
raisons et pas
seulement dans l’ordre empirique du discours en est déjà le
centre (Belaval 1993,
Etudes Leibniziennes, p. 173).
En ce qui concerne l’axiomatisation explicite Leibniz était sceptique quant
à son
utilité quoiqu’il plaidât en général pour celle de la méthode axioma-
tique. Dans les remarques sur les Principes de Descartes
Leibniz déclare
qu’il est “convaincu que la démonstration des axiomes est d’une
grande uti-
lité pour la véritable analyse ou l’art d’inventer”; il poursuit:
si Descartes avait voulu accomplir ce qui est le meilleur dans sa règle [dou-
ter
de tout ce qui comporte la moindre incertitude] il aurait dû travailler à
la
démonstration des principes scientifiques et ainsi achever en philosophie
ce que
Proclus avait essayé en géométrie où c’est moins nécessaire (GP, IV,
354,
355).
Si nous examinons un texte précoce comme les Eléments de vraie
piété
11
nous trouvons une démonstration de la proposition “bonum amati per se
ex-
peditur”, ainsi que d’autres définitions, démonstrations où le principe
de
raison est désigné comme “axioma magnum” (p. 13). Dans la
lettre X à Ar-
naud Leibniz revendique le more geometrico en
métaphysique:
Et quant à la métaphysique [Leibniz vient de traiter de géométrie] je
prétends
d’y donner des démonstrations géométriques, ne supposant pres-
que que deux vérités primitives,
savoir en premier lieu le principe de con-
tradiction [...] et en deuxième lieu
que rien n’est sans raison.
Le “presque” s’expliquant par le fait que Leibniz admet de plus deux véri-
tés de
fait: d’une part cogito et d’autre part cogitata sunt. L’ordre axioma-
tique euclidien est ainsi conçu par
Leibniz à la fois comme un auxiliaire de
l’art d’inventer, et d’autre part comme
une alternative aux techniques dis-
putationnelles des Scolastiques et à
l’intuitionnisme cartésien, une fois que
cet ordre axiomatique euclidien enrichi
de la méthode ramiste des tables de
définition.12 En effet il diffère d’Euclide
par l’insistance sur la nécessité de
définitions réelles qui livreraient
l’anatomie même de la chose, et pas seule-
ment des propriétés nécessaires à
l’identification de l’objet dans la percep-
tion spatiale lors de la
démonstration. Il diffère également d’Euclide par la
démontrabilité des
axiomes,13 ou plus exactement leur résolubilité en identi-
ques; il critique le
caractère tacite des postulats,14 qui a des conséquences
néfastes surtout quand la méthode euclidienne est appliquée en philoso-
phie.
On entend ici avec Leibniz par ‘méthode euclidienne’ non pas une mé-
thode au
sens cartésien ou même spinoziste mais plus exactement une ‘lo-
gique’ des
inférences sur des relations géométriques d’égalité ou de simili-
tude, logique
qui est dérivée de la logique commune dont la syllogistique
est une expression.
On ne peut donc mettre sur le même pied Euclide et
Aristote et ce sens il n’y a
pas au sens absolument strict de méthode eucli-
dienne, pas plus que de méthode
des jurisconsultes:
la logique [d’Aristote] est aussi susceptible de démonstrations que la
géo-
métrie, et l’on peut dire que la logique des géomètres, ou les manières
d’ar-
gumenter qu’Euclide a expliquées et établies en parlant des
propositions,
sont une extension ou promotion particulière de la logique générale
(NE,
IV, II, 12).
ces inversions, compositions et divisions des raisons dont il [Euclide] se
sert
ne sont que des espèces de formes d’argumenter particulières et pro-
pres aux
mathématiciens et à la matière qu’ils traitent; et ils démontrent ces
formes avec
l’aide des formes universelles de la logique commune (NE,
IV,
XVII, 4).
La considération des sorites met Leibniz en face d’un fait logique capital:
il
serait peu judicieux de vouloir se passer des formes abrégées
d’inférences
dans les sorites, tout comme il serait peu judicieux de faire les
calculs sans
utiliser des routines et en comptant uniquement sur l’énumération.
On a ici
une opposition entre un processus ou sont intégré des bloes de
raisonne-
ment et un processus pas à pas où chaque étape est complètement
détaillée.
Les géomètre ne doivent pas utiliser ce procédé pas à pas
comme un homme qui voudrait obliger les marchands dont il achète quel-
que chose
de lui compter les nombres un à un comme on compte au doigt
[...] ce qui
marquerait sa stupidité [...] ou bien cela marquerait un caprice
s’il savait ces
abrégés et ne voulait point s’en servir (NE, IV, XVII, 4).
Par contre Leibniz soutient certainement qu’un philosophe doit penser pas
à pas,
car dans le raisonnement géométrique l’erreur se marque aussitôt, ce
qui n’est
pas le cas pour la philosophie:
les géomètres on trop de moyens de découvrir les moindres erreurs, si par
mégarde
elles15 leur échappaient. C’est dans la philosophie qu’il faudrait
employer principalement cette rigueur exacte du raisonnement, parce que
les
autres moyens de s’assurer y manquent le plus souvent (GP VII, 166).
La différence entre géométrie d’un côté et physique et métaphysique de
l’autre
est radicale de ce point de vue:
J’ai remarqué que la cause qui fait que nous nous trompons si aisément
hors des
mathématiques, est que les géomètres ont été si heureux dans leurs
raisonnements,
n’est que parce que dans la géométrie et autres parties des
mathématiques
abstraites, on peut faire des expériences ou preuves conti-
nuelles, non
seulement sur la conclusion, mais encore à tout moment [...]
en réduisant le tout
au nombre [...]; en métaphysique et en morale c’est
bien pis [qu’en
physique]16 Souvent on n’y saurait faire des expériences sur
des
conclusions que de manière bien vague, et en matière de métaphysique
l’expérience
est quelquefois tout à fait impossible en cette vie. (C
176)
Effectivement tout au long de son oeuvre Leibniz s’est efforcé à la fois
de
perfectionner et de promouvoir la logique des géomètres. Dans le De
Arte
Combinatoria Leibniz fait un parallèle entre la géométrie et la jurispru-
dence en
ce qui concerne la distinction des cas (complexes) et des éléments
(simples),
annonçant sans doute la distinction ontologique des cas ou états
de choses et
éléments ou monades. En 1671 il dérive l’axiome euclidien “le
tout est plus grand
que la partie” du principe de raison, par un renchérisse-
ment sur Euclide. Dans une
lettre de 1675 à Simon Foucher il approuve
Robertval (1602-1675), l’occupant de la
chaire créée par Ramus au Collège
Royal, qui “a essayé de tout prouver en géométrie,
même quelques uns des
axiomes” (GP, I, 371). En 1678 Leibniz reconnaît à une
définition du cer-
cle par Euclide (en termes d’engendrement et non de marques
distinctives)
le caractère d’une “définition réelle” c’est-à-dire d’une définition
qui mon-
tre la possibilité de la chose et il oppose cette véritable définition
réelle du
cercle à la définition cartésienne de Dieu (GP, VII, 296). Leibniz relit
le li-
vre I des Éléments d’Euclide en 1679 (notes de lecture
dans GM, V, 183 -
211), partie qui est la seule commentée par Proclus, qu’il cite
d’ailleurs fré-
quemment dans ces remarques, et c’est probablement en partie à la
faveur
de cette lecture qu’il précise sa nouvelle approche physique non
quantita-
tive, telle qu’il expose par exemple à Huygens (GM II, 17-20) à propos
no-
tamment de l’analysis situs. Dans un essai de 1679 sur
cette discipline Leib-
niz mentionne le De datis d’Euclide, consacré à la situation
ou à la position
des figures géométrique, ceci confirmant que son intérêt pour
Euclide en
1679 provenait en partie de son désir à la fois de se démarquer et de
récla-
mer de lui. Dans les Méditations sur la connaissance, la
vérité et les idées,
Leibniz note que les tentatives de syllogistiser les
Eléments d’Euclide ne
sont pas utiles, car cette mise
en forme est trop fastidieuse (GP, IV, 426).
Par ailleurs Leibniz reconnaît
contre Descartes à la syllogistique un intérêt
pour l’art de juger en ce qui
concerne les inférences nécessaires, intérêt qui
pourrait être marqué par l’usage
critique de cette méthode, car les erreurs
“sont plus souvent des erreurs contre
la forme logique qu’on ne le croit”,17
ceci comparé aux erreurs portant à proprement parler sur les principes.18
Dans les Nouveaux essais (IV, vii) Leibniz distingue les
axiomes secon-
daires démonstrables et les axiomes primitifs non démontrables.
Les axio-
mes primitifs sont les propositions identiques (A, VI, 2, 408). Les
axiomes
primitifs sont les seuls indispensables; on pourrait se limiter à eux,
mais
Leibniz souligne que les démonstrations seraient peu maniables. Les
axio-
mes secondaires sont donc des abréviations commodes dérivée des
axiomes
primitifs qui sont les seuls fondements de la démonstration:
Et quant aux autres axiomes qui en sont démontrables [des primitifs],
on pourrait
s’en passer, absolument parlant, et tirer les conclusions immé-
diatement des
identiques et des définitions, mais la prolixité des démonstra-
tions et les
répétitions sans fin où l’on tomberait alors, causeraient une con-
fusion horrible,
s’il fallait toujours recommencer ab ovo: au
lieu que suppo-
sant les propositions moyennes déjà démontrées, on passe aisément
plus
loin: “Les sciences s’abrègent en s’augmentant”, ce qui est un paradoxe
très
véritable, car plus on découvre de vérités et plus on est en état de
découvrir
une suite réglée.19
Et cette supposition des vérités déjà connues est utile surtout à l’égard
des
axiomes, car ils reviennent si souvent que les Géomètres sont obligés
de
s’en servir à tout moment sans les citer. De sorte qu’on se tromperait
de
croire “qu’ils n’y sont pas, parce qu’on ne les voit peut être pas toujours
al-
légués à la marge” (op. cit., p. 415). On comprend donc
pourquoi Leibniz
n’estime pas nécessaire de suivre dans l’exposition d’une
métaphysique un
ordre axiomatique complètement explicite: de par la nature même de cet
ordre, tel
qu’il le conçoit, ou bien nous sommes explicites mais nous deve-
nons
prolixes20 et donc confus, ou bien nous nous en tenons aux
axiomes
primitifs et nous devons donc supposer des vérités déjà démontrées, en
se
servant des axiomes comme des démonstrations par défaut des
propositions
identiques, qui elles sont indémontrables:
Donc seules les identités sont indémontrables, mais tous les axiomes
sont
démontrables [ici en 1678 Leibniz ne distingue pas entre deux types
d’axiomes]
même s’ils sont pour la plupart si clairs et si faciles qu’ils ne ré-
clament pas
de démonstration [...] ils sont démontrables dans le sens que si
l’on conçoit
leurs termes (i.e. en subsituant les définitions pour les termes
définis) il
devient clair qu’ils sont nécessaires ou que leur contradiction im-
plique une
contradiction dans les termes (Lettre à Herman Conring, GP, I,
194).
Dans quelle mesure la métaphysique peut-elle se confermer à cette
méthode
axiomatique, provenant d’une révision de la méthode euclidienne?
Leibniz
dans ses textes sur la méthode scientifique en métaphysique met en
avant
plus la définition réelle, obtenue au terme d’une analyse, que la
méthode
axiomatique proprement dite, définition réelle qui prouve la possibilité
ou
l’essence d’une chose:
Lorsque la propriété [qui entre dans la définition] donne à connaître
la
possibilité de la chose, elle fait la définition réelle (Discours de
métaphy-
sique, § 24).
Cependant un second trait de la méthode en métaphysique conduit plus
près de
l’axiomatique. II s’agit du fait que les deux grands principes, de
contradiction et
de raison suffisante sont en fait des conséquences du Prae-
dicatum inest
subjecto:
il faut toujours qu’il y ait quelque fondement de la connexion des termes
d’une
proposition qui doit se trouver dans leurs notions. C’est là mon
grand principe
dont je crois que tous les philosophes doivent demeurer
d’accord et dont un des
corollaires est cet axiome vulgaire que rien n’arrive
sans raison.
Ce lien est montré encore plus nettement dans ce fragment:
le principe fondamental du raisonnement est que rien n’est sans raison ou
pour
dire les choses plus précisément il n’y a pas de vérité pour lequel il n’y
a pas
de raison. La raison d’une vérité consiste dans la connexion du prédi-
cat avec
le sujet, c’est à dire quelle le prédicat est dans le sujet (C, 11).
Si la métaphysique vise à être une science démonstrative “rivalisant en ri-
gueur
avec la science paradigmatique de la géométrie”, si
la métaphysique est une science qui fournit
potentiellement des résultats
possédant la certitude des théorèmes géométriques
(Rutherford,
1995,
pp. 77, 78),
la question se pose immédiatement du statut de ce qui fait la rigueur de
la
géométrie, la méthode axiomatique, dans la métaphysique. Nous sommes
en
effet en présence d’une situation étonnante dans la mesure où a) Leibniz
n’a
jamais renoncé, en particulier dans sa correspondance, à faire de la
mé-
taphysique une science démonstrative, b) les écrits fondamentaux de
méta-
physique (dont la Monadologie) ne possèdent pas une
forme axiomatique
explicite. On peut rappeler que Leibniz dans la Théodicée distingue deux
présentations en philosophie:
acroamatique et exotérique. Qu’est-ce qui
distingue précisément ces
démonstrations? La présence (acroamatique) ou
l’absence (exotérique) de la
démonstration:
Est tamen inter philosophandi modos discrimen ingens, alius enim est,
ut sit
dicam, Acroamaticus, alius exotericus. Acroamaticus est, in quo om-
nia
demonstrantur, exotericus, in quo quaedam sine demonstratione dicun-
tur.21
Leibniz affirme que cette différence peut être observée dans les mathémati-
ques
elles-mêmes.
On doit dissiper d’emblée un malentendu. La Monadologie a
certes été
composée pour Rémond afin de faciliter la rédaction d’un nouveau De
re-
rum natura par un poète, l’abbé Fraguier,22 mais sa composition se plie éga-
lement
à une exigence de clarté exprimée par Rémond qui associe clarté et
démonstration. Ce
dernier recommande en effet à Leibniz d’écrire son texte
“loin des sens” et “comme
les axiomes des géomètres”.23 Le véritable com-
manditaire et destinatarie de la Monadologie semble être
d’avantage Ré-
mond que Fraguier:
Rémond se plaint de ne pouvoir donner à son poète [Fraguier] les pe-
nsées
suffisantes. Il envoie un poème de Fraguier sur la philosophie leibni-
zienne
dont le philosophe tiendra le plus grand compte [...] Rémond joint à
ce poème un
véritable “Art Philosophique” et insiste sur le plan et le style
que devrait
adopter Leibniz [...] on peut dire que la Monadologie a été
composée pour Rémond, en vue d’une “mise en poésie”
par Fraguier, le
tout sous la protection du salon d’Orléans. Telle est l’origine
formelle de la
Monadologie.
(Robinet 1954, p. 14)
Pourquoi cette recommandation de Rémond? L’abbé Fraguier, tout poète
qu’il fut,
est cartésien, comme Rémond et Leibniz doit donc obéir à l’exi-
gence de clarté
cartésienne où la démonstration consiste simplement en une
exposition qui
améliore la clarté du sujet. Cependant Leibniz a une concep-
tion plus
informative de la synthèse, la démonstration permettant non seule-
ment la
clarté, mais la découverte de nouvelles vérités.
Afin d’expliquer l’abandon de la méthode géométrique à partir du Sys-
tème
nouveau (1695) Rutherford24 invoque une raison qu’il faut examiner -
en effet si Rutherford a
raison c’est toute l’interprétation d’un ordre axio-
matique sous-jacent à la Monadologie qu’il faudrait revoir. Cette raison est
la
suivante: le passage d’un public scolastique à un public cartésien a priori
peu
convaincu par l’usage scientifique de la méthode démonstrative en phi-
losophie. Le
biffage de certaines articulations logiques dans les écrits desti-
nés au public
cartésien (comme le Dialogue de Philarète et d’Ariste
(1712-
1714) va évidemment dans ce sens, Leibniz justifiant son choix par la
dis-
tinction entre acroamatique et exotérique (cf. supra).
Toutefois Rutherford
va trop loin lorsqu’il associe style exotérique et abandon de
la méthode lo-
gique en métaphysique. Ce qui apparaît explicitement avec le Système
nou-
veau c’est le thème d’une réforme de la logique, ou du moins d’un
abandon
provisoire des recherches sur la Spécieuse formelle et générale (l’algèbre
lo-
gique) que Leibniz trop isolé et ne disposant pas des vastes loisirs
nécessai-
res, ne peut achever (ou peut-être commencer) au profit de logiques
nou-
velles plus exotériques et plus naturelles. Il y a d’abord l’idée d’une
Lo-
gique des disputes ou “dispute formelle” (l’expression est de Leibniz),
pro-
jet qui se renforce dans toute la période monadologique, de 1695 à 1716.
La
Lettre à Wagner (1696) est un document absolument décisif,
surtout lor-
squ’on le met en relation avec le Discours de
Théodicée. La Lettre à Wagner
est un document capital notamment parce quelle contient un témoignage
détaillé de
l’évolution des idées logiques de Leibniz et un exposé extrème-
ment nuancé de son
attitude vis-à-vis de la syllogistique. Leibniz soutient
deux thèses originales sur
la dispute: i) on ne doit pas séparer logique et
dispute, ii) on doit réformer l’art
de la dispute pour en faire une logique de
la dispute. Leibniz n’a pas laissé
d’écrits spécifiques sur la logique de la dis-
pute, mais on peut considérer dans
une certaine mesure le Discours de
Théodicée comme une première esquisse informelle
du programme contenu
dans la Lettre à Wagner (GP VII, pp.
514-527). Cette réforme doit passer
pas l’édictions de règles spécifiques: des
règles de commencement de la dis-
pute énonçant à qui revient la charge de la
preuve, répartissant les rôles de
soutenant et d’opposant, des règles de clôture,
afin d’éviter que la contro-
verse ne s’éternise, des règles d’attaque et enfin des
règles de défense.
Leibniz prend soin de distinguer sa logique des disputes de la logique
des
probabilités (§ 28). Au § 22 de ce texte Leibniz soutient clairement que
la
controverse sur un Mystère ne doit “jamais abandonner les vérités néces-
saires
et éternelles”. La distinction entre une logique des probabilités (qui
ne se
confond pas avec un calcul des probabilités) et la logique des disputes
est
réaffirmée au § 32, bien que le concept de “présomption” (distingué au
§ 33 de
celui de “conjecture”), tiré de la jurisprudence et donc lié à sa lo-
gique des
probabilités, puisse être un concept mixte utilisé à la fois dans la
comparaison
des hypothèses scientifiques probables et dans les controver-
ses religieuses -
par exemple la présomption de l’existence de Dieu.25 Entre
la Lettre à Wagner et le Discours de métaphysique, les Nouveaux essais
re-
prennent eux aussi, dans des passages décisifs où Leibniz défend
contre
Locke l’utilité de la logique (Livre IV) le thème d’une réforme de l’art
des
controverses: “l’art de conférer et disputer aurait besoin d’être tout
refon-
du” (IV, VII, 11). Leibniz défend même contre Locke l’unité de la
logique
des disputes et de la méthode démonstrative:
Et que pourrait-on faire de meilleur, que de réduire la controverse,
c’est-à-dire
les vérités contestées, à des vérités évidentes et incontestables;
ne serait-ce
point les établir de manière démonstrative? (Ibid.).
Locke-Philalèthe soutient que les principes invoqués n’ont aucune validité,
mais
seulement un usage stratégique. Leibniz répond très clairement que
d’une part les
principes invoqués dans la dispute doivent pouvoir être utili-
sés dans une
démonstration non disputationnelle et que d’autre part la dis-
pute est une forme d’analyse réversible en synthèse. Ces éléments de lo-
gique
des disputes éclairent l’argumentation de la Correspondance avec
Clarke où les
thèses négatives de Leibniz sur l’espace sont établies de ma-
nière discursive et
apagogique via le principe de raison suffisante. Les affir-
mations des Nouveaux essais laissent penser que le Principe de Raison
Suffi-
sante est à la fois un principe argumentatif (offensif ou défensif) de
Leibniz
et un principe de synthèse démonstrative. Très exactement comme les
thè-
ses du Discours de métaphysique sont établies
synthétiquement à partir du
Principe d’Identité des Indiscernables, les thèses
des Nouveaux essais sur le
caractère logique de la dispute
permettent d’affirmer une synthèse à recons-
truire vers 1710-1716 à partir du
Principe de Raison Suffisante:
Ces grands principes de la raison suffisante et de l’identité des
indis-
cernables changent l’état de la métaphysique, qui devient réelle et
démons-
trative par leur moyen; au lieu qu’autrefois elle ne consistait qu’en
termes
vides. (GP, VII, 372)
Une fois établies les règles formelles de la dispute, on pourrait, selon
Leib-
niz, distinguer entre expliquer (Essais de
Théodicée, Discours préliminaire,
§5), prouver (§ 58), soutenir (§ 66).
On peut donc affirmer contre Rutherford que le style exotérique n’est
nullement
incompatible avec l’esprit démonstratif, que la réforme de la lo-
gique naturelle
est nécessaire, notamment par le biais des règles de dispute,
que la dispute
formelle utilise des principes communs utilisables dans un
ordre purement
synthétique, que la logigue des disputes incorpore des ar-
guments
syllogistiques, qu’elle exclut l’éloquence, diffère de la logique
des
probabilités (cf. Nouveaux essais, IV, xvii, 5),
qu’elle permet la réconcilia-
tion en théologie et l’arbitrage des controverses
en métaphysique.
L’aspect hypothétique ne nuit en aucune manière à l’emploi de la mé-
thode
démonstrative. C’est un vieux thème leibnizien que l’on peut com-
mencer à
démontrer lorsque l’analyse n’a pas encore fait apparaître complè-
tement les
éléments. C’est un thème anti-cartésien (et plus largement
anti-
fondationaliste): dans les De elementis cogitandi
Leibniz emploie le terme
d’analyse au sens de résolution. Leur démonstration est
la même sans
bonne analyse. Il est souvent utile de continuer la synthèse même
sans
bonne analyse préalable “parce qu’autrement on s’arresterait trop
quelque-
fois” (GP, VII, 165). Lorsqu’on fait des suppositions, au moins sait-on
quel
est le lien entre conclusion et hypothèses. De plus la plupart des
erreurs,
comme celles de Spinoza proviennent non des principes mais d’erreurs
de
raisonnement (ibid.). Lorsqu’on fait une supposition ce
qui importe c’est
d’expliciter la demande - et ceci est plus important en
philosophie qu’en
géométrie (GP, VII, 166).
Peut-on et doit-on, au vu de tout ceci, affirmer que l’achèvement du
Système Nouveau marque la fin de l’utilisation de la logique en
métaphy-
sique? On peut conclure au moins deux choses différentes. Tout d’abord
la
période postérieure au Discours de métaphysique marque la
fin d’une utilisa-
tion simultanée de l’analyse et de la synthèse, comme par exemple
dans le
De affectibus. Par analyse on expose des concepts confus par des
concepts
plus simples, quoique cette exposition à partir de 1695 ne se confonde
plus
avec une exposition logique de phrases de la langue naturelle. On trouve
un
exemple d’utilisation simultanée de l’analyse et de la synthèse par
exemple,
en 1671-1672, dans le Demonstratio propositionarum
primarum (A, VI, II,
479-484). A partir du Discours de
métaphysique “il n’y a plus que de la syn-
thèse” sans analyse, un bon
exemple étant précisément fourni par la Mona-
dologie. Cette synthèse reste dans un
ordre démonstratif. Ce que réalise
Leibniz en métaphysique à partir du Système nouveau est comparable à ce
que, selon lui, ont
effectué les géomètres postérieurs à Euclide sans Analysis
situs. Il s’agit
certainement d’un travail fécond. Ensuite, cette période est in-
fluencée par
l’économie propre de la logique de Leibniz. Elle connaîtrait
une certaine
stagnation, peut-être un échec, Leibniz cherchant à définir l’i-
dentité de la
logique par rapport à une algèbre générale. Les éches rencon-
trés dans cette
dernière ont probablement dissuadé Leibniz d’utiliser son
analyse logique des
langues naturelles dans la synthèse métaphysique,
comme il l’avait cependant annoncé
en 1672-1679. Il envisageait très claire-
ment et probablement à des fins iréniques
une logique plus naturelle, mais
qu’il n’eut pas le temps de construire.
A partir du Système nouveau il n’y a donc pas abandon de la
méthode
axiomatique en métaphysique, ni incompatibilité entre l’exotérique et le
dé-
monstratif. De la même manière que Leibniz souhaite simplifier la
syllogis-
tique, ou rendre Euclide fidèle à ases exigences, il aboutit
progressivement
à la conviction que la méthode appropriée en métaphysique
proviendra
aussi d’une réforme de la logique disputationnelle des scolastiques.
Il ne
s’agit pas d’une régression vers une méthode traditionnelle dont les
huma-
nistes avaient montré le caractère infructueux, mais d’une conséquence
mé-
thodologique découlant d’une prise de conscience de l’impossibilité
d’une
bonne analyse en philosophie. L’idéal reste celui des géomètres et en
ce
sens Leibniz ne cède pas sur sa conviction que la méthode axiomatique
est
la bonne pour la métaphysique, mais en l’absence des résultats qui
permet-
trait à cette méthode de s’instaurer, il convient de recourir à une
méthode
semi-intuitive, mais rigoureuse et populaire, mais formelle.
Nous avons rappelé la conception leibnizienne de l’axiomatique pour
expliquer
qu’il faut chercher la métaphysique axiomatique de Leibniz du
cóté des axiomes
primitifs et des définitions réelles. On ne peut imposer un
ordre axiomatique sur
la Monadologie. Il faut d’abord dégager la
structure
axiomatique implicite, avant de reconstruire une axiomatique dans un
style
plus moderne. La méthode de reconstruction en philosophie consiste à
re-
construire sur la base d’une axiomatique potentiellement présente dans
le
texte. Comme nous l’avons dit, l’écart entre l’axiomatique sous-jacente
et
notre propre reconstruction peut précisément constituer un objet
d’inter-
prétation privilégié.
l’on veut répondre à cette question il faut prendre comme base le texte de
l’édition critique des manuscrits par A. Robinet (1954). En effet puisque
Leibniz a donné à la Monadologie une présentation exotérique il est proba-
ble qu’il ait gommé dans la rédaction définitive les articulations de l’argu-
mentation qui portaient la trace d’une structure axiomatique sous-jacente.
Si nous prenons les premiers alinéas ou paragraphes, décisifs pour la pro-
blématique de l’un et du multiple, il semble que ce soit le cas. Par exemple
le brouillon fait de “simple c’est-à-dire sans parties” un § 2, alors que dans
la deuxième copie, base du texte définitif cette assertion devient un mem-
bre de phrase du § l.26
substance simple <qui entre dans les composés>.28
substance simple qui entre dans les composés; simple, c’est-à-dire, sans
parties.
Dans le manuscrit le § 2 commence par “or” biffé dans le texte définitif;
le
§ 4 du manuscrit commence par “et” biffé dans le texte définitif.
D’autre
part l’ordre de rédaction peut s’avérer intéressant pour la
structure axioma-
tique sous-jacente; par exemple les § 17 et 18 ont été
écrits en marge après
le § 19 et effectivement dans la structure en
question le § 19 contient une
définition qui appelle des conséquences dans
les § 17 et 18 alors que dans
le texte définitif le § 19 apparaît comme une
conclusion des § 17 et 18.
partiellement l’ordre axiomatique (acroamatique) ‘définition-théorèmes’. La
Monadologie commence par une définition de la monade: “une substance
simple”. Pour que cette définition soit réelle, elle doit montrer la possibilité
de la monade. Cette possibilité est contenue dans le § 2 “il faut qu’il y ait
substances simples, puisqu’il y a des composés”. Leibniz ne prend pas
comme point de départ les composés (“il y a des substances composées”),
mais la définition de la monade (“la monade [...] n’est autre chose qu’une
substance simple”). Bélaval se demandait: “Fournit-il [la] démonstration?”
(op. cit., p. 172). La réponse est: Non. L’argument de Bélaval pour l’emploi
du neutre (“«composé/s/» au sens d’amas ou d’agrégat, monte un argument
pour le simple”, p. 173 semble un peu fragile:
Et pourquoi «composé/s/» au neutre? C’est que, s’il n’y a aucune
équi-
voque à parler de «substances simples», il y en aurait une à parler
de «sub-
stances composées», expression réservée aux seuls ensembles de
monades
constituant des organismes. (p. 172)
A propos du problème de l’identification des particuliers dans la
cons-
cience, Strawson examine ce point, la véritable nature des monades,
et
après avoir réfuté l’idée suivant laquelle leur définition comme points
de
vue serait suffisante (un point de vue ne pouvant individuer pour
Stra-
wson29) il est conduit à identifier les monades et
les concepts:
Nous concevrons plutôt les individus de base du système [les mona-
des]
comme étant eux-mêmes ces concepts, ces notions complètes. (1973,
p.
141)
Cette interprétation se distingue, suivant Strawson, de celle pour qui
les
monades sont des particuliers. Cependant elle est exposée à des
difficultés
que souligne Strawson, la plus importante étant une tension
entre le fait
que Leibniz maintient une “ontologie de particuliers” et le
fait que les “en-
tités ultimes” du monde ne sont pas de nature
spatio-temporelle (cf. op. cit.
p. 147). Plus précisément si ces éléments
ultimes sont des entités non spa-
tio-temporelles, on ne peut les
identifier par des démonstratifs - je ne peux
dire “cette monade-ci” comme
je dis “cet homme-ci qui...” -, moyen qui
est classiquement ce qui permet
d’identifier des particuliers. L’axiomatisa-
tion de la Monadologie ne peut donc s’appuyer sur une définition de la
mo-
nade contenue dans une axiomatisation implicite sous-jacente au
texte.
Cette axiomatisation du texte a été tentée récemment de trois points
de vue
principaux, que nous exposerons rapidement:
(Parsons,32, Zalta33);
cations de Chisholm).
Ces trois reconstructions thématisent différemment la question de l’un
et
du multiple: pour la méréologie l’un est partie d’un tout, une
multiplicité;
pour la théorie meinongienne un objet abstrait est une unité
instanciée dans
le multiple; pour la théorie des guises les monades sont
des unités d’aspects
ou de points de vues multiples.
une lecture de la Monadologie conçue comme une métaphysique de l’un et
du multiple. On peut refuser d’emblée l’éclairage que peuvent jeter des ten-
tatives contemporaines sur un texte classique, au nom d’un anachronisme,
d’une discontinuité des systèmes conceptuels. Mais il faut bien tenir compte
de ce que des tentatives contemporaines de métaphysique axiomatique (ou
au moins rigoureuse) butent symptômatiquement sur la difficulté d’axioma-
— 57 —
tiser la Monadologie,
comme si les contemporains pressentaient dans ce
texte à la fois les
prémisses d’une telle axiomatisation et son inachèvement,
contradiction
apparente que l’étude de la doctrine met particulièrement en
lumière. C’est
l’exact inverse de l’Ethique de Spinoza, qui se présente
expli-
citement sous une forme axiomatique mais qui révèle à la grande
majorité
des commentateurs une structure très éloignée de toute
axiomatique: il suf-
fit de suivre le crayon à la main n’importe quelle
démonstration de l’E-
thique pour s’en convaincre. Les axiomatisations que
nous allons présenter
ne sont pas des axiomatisations complètes du texte
entier de la Monadolo-
gie. Ce sont des propositions théoriques qui jettent
une vive lumière sur la
question de l’un et du multiple dans la Monadologie et qui situent ce texte
dans l’histoire
de l’ontologie formelle de Proclus à Husserl.
gen 1990, pp. 8, col. 2-11, col. 1) prend comme point de départ une redéfi-
nition de la monade:
Def. 1: Mon (a): 〈- -〉 non (Ex xμ a)
c.-à-d. qu’il n’existe pas de tel que x est une partie de a. Burkhardt et
De-
gen remarquent que la phrase: “Et il faut qu’il y ait des substances
simples,
puisqu’il y a des composés; car le composé n’est autre chose
qu’amas, ou
aggregatum de simples” contient beaucoup d’implicite, implicite
que leur
axiomatisation se donne pour tâche d’élucider. Ils établissent
comme pre-
mier axiome l’existence du composé:
Mais comment utiliser Ax 1 pour prouver l’existence des monades? Ils
doi-
vent pour cela introduire, une définition de la composition seule
étant in-
suffisante un “principe logique caché, sur lequel nous pouvons
fonder sa
preuve de l’existence des monades” (op.
cit., p. 9, col. 1), stipulant qu’il exi-
ste un a tel qu’il
n’existe pas une chaîne descendante infinie pour la relation
μ. A partir de
là, Burkhardt et Degen obtiennent assez facilement des axio-
mes de
transitivité, d’irréflexivité de μ et d’infinité des monades. Ces axio-
mes
sont des conséquences d’affirmations de Leibniz dans le texte, et
l’a-
xiome d’infinité des monades est un énoncé explicité de Leibniz
(tandis que
l’axiome 4 de l’irréflexivité de μ est plus indirect). Cette
axiomatisation
consiste à dégager les propriétés de la relation μ . Elle cherche à établir une
preuve saine de
l’existence des monades et elle trouve cette preuve (qui fait
échapper à
une pure pétition de principe sur l’existence du simple, une
pure déduction
verbale du simple à partir du composé) dans une propriété
de la relation μ,
la propriété d’être fondée, ou de fondationnalité
(founded-
— 58 —
ness). Si la relation μ est fondée, on peut donner un
sens au passage du
composé au simple dans les premiers alinéas de la Monadologie, et on peut
même dire que de ce point de
vue la propriété de fondationnalité est la
transcription formelle du fameux
passage “et il faut qu’il y ait des substan-
ces simples...”.35
tre du débat car elle se situe explicitement dans un projet de ‘métaphysique
axiomatique’ qui est dans le droit fil des préoccupations leibniziennes d’éta-
blir une certitude métaphysique comparable à celle des mathématiques.
Cette métaphysique axiomatique est le développement d’une ontologie con-
çue comme une théorie des objets, dans la lignée de Brentano, Twardowski
et Meinong. L’idée de départ est de construire une ontologie formelle de
tous les types d’objets, existants et non existants. L’existence spatio-tempo-
relle cesse d’être le seul type d’existence, car les objets non existants quoi-
que qu’étant des objets (par exemple des attitudes propositionnelles) n’exi-
stent pas dans l’espace et dans le temps. D’un point de vue historique, il est
intéressant de souligner que ce courant austro-polonais se situe explicite-
ment dans un courant de retour à Leibniz par-delà ou à travers le criticisme
kantien, qui précisément avait dénié, et dénie toujours à travers ses repré-
sentants, la possibilité d’une métaphysique scientifique. De ce point de vue
on peut discerner trois retours à Leibniz, en ce qui concerne les relationes
entre logique et métaphysique:
mathématique et de l’algèbre de Boole (Couturat, Russell);
théories des mondes possibles (Kaupi, Mates, Mondadori...);
théories contemporaines en ontologie formelle (Burkhardt, Simons,
Zalta, Castaneda...).
L’axiomatisation de Parsons est motivée par le souci de comparer la
théorie
des objets néo-meinongienne qu’il a mise au point avec la monado-
logie de
Leibniz. On peut voir là une utilité de la reconstruction axiomati-
que:
elle permet la comparaison des différents systèmes philosophiques. De
même
que l’existence d’une grammaire universelle formelle peut être avan-
cée comme contre argument à la thèse de l’indétermination de la
traduction
(la traduction ne s’opérant pas terme à terme mais via une
traduction ab-
straite), de même on peut réfuter l’argument de
l’incommensurabilité des
systèmes philosophiques par la comparabilité
formelle à l’intérieur de re-
construction axiomatiques, qui jouent alors
le même rôle que la grammaire
universelle pour le langage. Le point de
départ de Parsons (1980, p. 219)
est également une définition de la
monade:
x est une monade = def dans w° x est à la fois complet et possible.
Les propriétés qui sont ici données comme les propriétés essentielles de
la
monade sont des propriétés modales. Si x est une monade on définit
ainsi
l’apparaître d’une monade dans un monde:
x apparaît dans w = def il y a un objet qui existe dans w et qui a dans
w
exactement les propriétés nucléaires que x a dans w°.
Une fois que l’on a obtenu ces définitions, et moyennant un
métathéorème
qui définit ce que c’est pour un objet que de posséder une
propriété dans
un monde, on peut déduire un autre métathéorème:
métathéorème 1: si x est une monade, x apparaît exactement dans
un
monde.36
L’intérèt de cette axiomatisation est de lier la définition de la monade
à
son existence dans un seul monde. Cette existence dans un seul monde
qui
est un trait fondamental de la doctrine modale de Leibniz n’est pas
explici-
tement développé dans Monadologie.
L’axiomatique ici a pour vertu de dé-
duire de la définition de la monade
un trait essentiel de la doctrine modale,
et donc de relier deux parties du
système, celle qui concerne la structure
ontologique de l’univers et celle
qui concerne les mondes possibles. On
peut noter que ce métathéorème 1 est
le fondement d’une interprétation de
la doctrine modale de Leibniz à partir
de la théorie des répliques (counter-
parts theory) de D. Lewis.37
La métaphysique axiomatique de Zalta (1983) repose en partie sur
une
distinction entre exemplifier et encoder une propriété. On dira qu’un
objet
exemplifie une propriété si cet objet satisfait cette propriété; on
dira qu’un
objet encode une propriété si cet objet est déterminé par cette
propriété.
Les principes fondamentaux de la théorie des objets abstraits sont les
sui-
vants. Pour chaque propriété exprimable il y a un objet abstrait qui
encode
exactement les propriétés en question; deux objets sont identiques
si et seu-
lement si ils sont abstraits et encodent les mêmes propriétés;
deux proprié-
tés sont identiques si elles sont encodées par les mêmes
objets. L’axiomati-
sation de Monadologie par Zalta
ne prend pas pour point de départ la défi-
nition de la monade (qu’il
considère comme un objet abstrait possible au
sens fort) mais la définition
d’une relation de corrélation:
x est un corrélât de z dans un monde w ssi x exemplifie dans w
exactement
les propriétés que z encode.
C’est cette relation de corrélation qui va servir à définir la relation “z
appa-
raît dans un monde w”:
z apparaît dans w est définie: il y a un corrélât x de z dans w.
Et ce sont ces deux relations de corrélation et d’apparaître dans un
monde
qui permet de définir ce qu’est une monade:
z est une monade dans w est défini: il y a au moins un monde w tel que
z
apparait dans w.
Zalta à l’aide de ces définitions est capable d’obtenir les deux
théorèmes
suivantes (op. cit., p. 85) le Théorème 7
et le Théorème 8:
Théorème 7. Chaque monade reflète tout monde où elle apparaît.
Théorème 8. Chaque monade apparaît dans un monde unique.
La réinterprétation proposée par Castaneda repose sur sa théorie
des
guises, qu’on ne peut exposer ici. II suffit de caractériser brièvement
cette
théorie en rappelant qu’elle décrit comment les objets nous
apparaissent
sous des points des vues qui livrent certains de leurs
aspects, certaines de
leurs propriétés, et qu’elle affirme que nous ne
connaissons des objets eux-
mêmes que ces “guises” sous lesquelles ils nous
apparaissent (en ce sens
cette théorie a un accent profondément kantien:
les guises sont compara-
bles aux phénomènes).
Nous présenterons dans cette section une esquisse
d’axiomatisation
partielle des 15 premiers paragraphes de la Monadologie - c’est-à-dire de
ceux qui précédent la description des états internes de la monade et
qui
contiennent la déduction des lois de ces états, la perception et
l’appétition,
ou encore ceux qui contiennent un exposé de la nature des
monades avant
la description de leurs degrés de perfection et l’exposé de
la nature de l’a-
grégat ‘monde’.
On peut remarquer dans les premiers alinéas de la Monadologie alter-
nent les “il y a” (éventuellement “il n’y a
pas” ou “il n’y a point”) et les “il
faut” (éventuellement combiné avec “il
y a”: “il faut qu’il y ait”):
“il n’y a point de parties” “il n’y a ni figure...” (§ 3)
“il n’y a point aussi de dissolution...” (§ 4)
“il n’y a aucune manière concevable...” (§ 4)
“il n’y a pas de moyen...” (§ 7)
[Il faut attendre le § 33 ensuite:]
“il y a deux sortes de vérités” (§33)
“et il y a enfin des idées simples...” (§ 35)
“il y a une infinité de figures et de mouvements...” (§ 36)
“il y a en Dieu la puissance, puis la connaissance...” (§ 48)
“il y a une infinité d’univers possibles” (§53)
“il y a une monde de créatures, de vivants...” (§ 66)
“il n’y a rien d’inculte, de stérile...” (§ 69)
“il faut qu’il y ait des substances simples” (§ 2)
“il faut que les monades ayent quelques qualités...” (§ 8)
“il faut que chaque monade soit différente de chaque autre” (§ 9)
“il faut que la raison suffisante...” (§ 37)
“il faut bien que s’il y a une réalité dans les essences” (§ 44)
“il ne faut point s’imaginer...” (§ 47).
Les énoncés avec “il y a” (ou des dérivés) dressent une sorte de liste
des
éléments de la philosophie: par exemple les composés, idées simples,
Dieu.
Il faut noter que le ‘il y a’ peut énoncer deux choses différentes -
une don-
née de l’expérience (“il y a des composés”) ou une conclusion
d’une dé-
monstration (“il n’y a qu’un Dieu”). Les énoncés avec “il faut”
énoncent
des principes de la philosophie: par exemple la réalité attachée
aux essen-
ces, l’usage du principe de raison suffisante. Le “il faut qu’il y ait des
sub-
stances simples” en prend un relief particulier; il combine en effet
les deux
types de modalisation de l’énoncé (modalisation existentielle et
modalité
normative). Dans les premiers alinéas, le “il faut” modalise trois
énoncés
principaux: i) il faut qu’il y ait des simples; ii) il faut qu’il y
ait des qualités
des monades; iii) il faut que chaque monade soit
différente de chaque autre.
Le § 2 de ce point de vue présente
l’intéressante particularité de combiner,
de manière démonstrative, ou au
moins argumentative, le “il faut” avec le
il y a :
posés; car le composé n’est autre chose qu’un amas ou aggregatum de
simples.
On est ici en présence d’un constat d’existence du composé qui
débouche
sur la nécessité de l’existence du simple, ceci en vertu de la
définition même
du composé. Mis sous une forme axiomatique ceci
donnerait:
Définition: Le composé est un tout dont les simples sont des parties.
Axiome: Il existe des composés.
Théorème: Il existe des simples (par la définition et l’axiome).
La critique qui vient à l’esprit à propos de la définition - qu’une
définition
ne doit pas être un axiome déguisé - est hors de propos car
Leibniz, loin de
réduire la définition à un sens stipulatif ou
conventionnel comme Pascal par
exemple, soutient que la définition a un
rôle majeur dans l’axiomatique. Ce
qui soutient l’édifice axiomatique est
constitué d’une part par les proposi-
tions identiques, d’autre part par
les définitions. Or sans les secondes, les
premières resteraient de pures
tautologies dépourvues de tout contenu in-
formatif ou conceptuel. Il ne
faut donc pas s’étonner ici du rôle de la défi-
nition. On a ici le choix
entre reconstruire Leibniz dans un style axiomati-
que moderne, ou bien
respecter les particularités de son style axiomatique,
en formalisant
simplement les structures sous-jacente. En ce sens notre
axiomatisation est
beaucoup plus une symbolisation qu’une véritable axio-
matisation au sens
de Hilbert ou de Peano.
Dans ce cas le “il faut” modalise un théorème et le “il y a” un
axiome.
Est-ce toujours le cas? La réponse est négative, car il existe au
moins un
contre-exemple pour chacun de ces deux cas. Par exemple “il n’y a
qu’un
Dieu” n’est pas un axiome mais un théorème (cette existence est
prouvée);
“il faut que chaque monade soit différente de chaque autre” ne
semble pas
a contrario être un théorème, mais bien un axiome (cette
affirmation n’est
pas prouvée et d’autres propositions en sont
dérivées).
On reviendra sur ces premiers alinéas à propos de leur
reconstruction
méréologique. Il faut auparavant revenir sur la définition
de la monade. En
effet Leibniz, on vient de le voir, la définit comme une
unité simple entrant
dans des composés. Plus loin dans le texte il la nomme
un ‘veritable atome
de la nature’. Ces définitions ou caractérisations ne
sont pas suffisantes
pour déterminer la nature ontologique de la monade.
Elle entre certaine-
ment dans un classement des prédicaments d’orientation
ramiste.38 On peut
la définir comme ens + concretum + substantivum + suppositum + substantia
reale, mais est-ce un ens abstractum ou un ens? On justifie le
classement
comme concret de la manière suivante:
“Res sunt aut concreta aut abstracta” (GP II, 439)
“Nam concreta vere res sunt, abstracta non sunt res, sed rerum modi”
(GP
IV 147).
Les éléments de définition de la monade se réduisent à peu de
choses:
“substance simple” (§ 1), “atome de la nature, élément des choses”
(§ 3).
En fait la véritable définition de la monade, la définition réelle,
serait celle
qui la détermine à la fois comme une nature simple et
substantielle et
comme une activité perceptive et appétitive. C’est cette
activité qui permet
de la de la déterminer comme un opérateur sur l’un et
le multiple. C’est
aussi la prise en compte de l’activité monadique qui
permet d’introduire la
notion de point de vue. On aura à examiner les
différentes axiomatisations
sous ce triple aspect - atomicité, relations
un/multiple, point de vue.
dans la version donnée par P. Simons (1986), dans la mesure où ce langage
est le plus adéquat à une reconstruction axiomatique. On se limite ici évi-
demment à quelques indications, car une telle axiomatisation pour être me-
née à son terme demande une réflexion qui est loin d’être élaborée. Il nous
semble cependant conforme à l’esprit leibnizien de risquer un échantillon,
plutôt que d’attendre passivement une telle élaboration. Quoiqu’il en soit,
voici cette axiomatique. Les commentaires en italique doivent être soigneu-
sement distingués de l’axiomatisation elle-même.
— 64 —
∀ et ∃ sont les quantificateurs standard, on notera ‘«’ le symbole d’apparte-
nance méréologique qui se lit ‘x « y’: ‘x est une partie de y’, L et M sont re-
spectivement l’opérateur de nécessité et de possibilité qui se lisent ‘LF’: ‘il
est nécessaire que F’, MF: ‘il est possible que F’.
x est une monade si x est une substance et si x est simple
x est simple si x est sans parties
La somme de x et de y c’est le plus petit objet z dont x et y sont des
parties
tel que x « z et y « z
∀ x simple (x) → ¬ ∃y ¬ (x « y).
Cet axiome stipule qu’il n'existe pas de simple qui ne soit
partie d’autre chose,
c’est-à-dire d’un composé. Cet axiome est
complémentaire de la définition 2.
On pourrait l’appeler un «axiome d’élémentation» car il signifie que le
simple
est toujours élémentaire, ou élément d’un composé. La monade
suprême fait
exception, mais on pourrait ajouter des contraintes
hiérachiques sur l’apparte-
nance méréologique pour que la monade
suprême soit élément d’elle-même et
donc que tout simple soit
élémentaire en ce sens.
Les simples ne sont pas appréhendables directement, mais en tant qu’ils
en-
trent dans les composés.
Axiome 2, de dépendance ontologique
∀ x ∀ y x ⊗ y →∃z y⊗z ⋀ ¬ ∃u z⊗u
On note ‘x ⊗ y: ‘x dépend de y’
Axiome 3, de conservation de la structure méréologique
— 65 —On peut obtenir cet axiome à partir de l’axiome essentialiste:
Etre c’est être quelque chose. Ceci est dirigé contre la
doctrine de l’‘indivi-
duum nudum’.
Théorème 1, dit théorème de fondation
∀x composé (x) ⋀ ∃y simple (y) → ¬ ∃z z⊗y
Le sens intuitif de ce théorème est le suivant: dans tout
composé il y a au
moins un élément tel que rien ne dépende de cet
élément et donc qui est 1’élé-
ment dernier dans la descente du composé
au simple. Burkhardt et Dengen en
font un axiome. Nous le faisons
dériver d’un axiome de dépendance.
Théorème 2, théorème d’existence de la monade
∃x composé (x)
donc ∃x agrégat
(x)
∃x agrégat (x) → ∃y ¬i y⊗x
donc ∃y monade (y)
Théorème 3 de composition du réel
∀x (simple (x) v agrégat (x))
Nous espérons par ces quelques indications donner une idée précise de
la
completxité des problèmes qui se posent. La principale difficulté
pro-
vient sans doute de la richesse expressive du langage qu’il convient
d’utili-
ser pour donner une forme à cette axiomatique, dès lors qu’on ne
se limite
pas à un seul type de relation (méréologique, ou point de vue, ou
expres-
sion...) mais qu’on essaie, comme Leibniz, de les combiner tous.
Nous
avons par exemple utilisé à la fois des relations d’appartenance et de
dépen-
dance. L’esprit d’une axiomatique formelle exigerait que l’on fixe
la méta-
relation entre ces deux relations. Très probablement la logique
modale, que
ce soit S4 ou S5, est insuffisante pour cette tâche. Une méréologie
modale
est dans la bonne direction, mais celle-ci est encore dans
l’enfance.39
Nous aurions pu prendre un point de départ différent: on peut parler
dans
la Monadologie comme d’une axiomatique de la perfection,
qui obéit à
la règle suivante:
x est plus parfait que y, si x est plus unifié que y, x est plus unifié que y
si x
unifie plus d’éléments que y. x et y peuvent être soit des unités
substantiel-
les (des monades), soit des unités accidentelles (des
agrégats).
x est plus unifié que y si x est un substantiellement et y
accidentellement
(on laisse de côté les règles de perfection pour les
agrégats).
L’opération d’unification est la perception: par la perception une unité
sub-
stantielle x unifie un divers z; plus z est riche, plus x est unifié
et donc par-
fait. Il découle de cela un théorème:
si x est parfait au suprême degré, alors x perçoit une diversité de
richesse
maximale, c’est-à-dire l’univers.
Dans la Monadologie l’alinéa 47, qui condense l’exposé
de la production
originaire, est placé à la fin d’une doublé démonstration
de l’existence de
Dieu, a posteriori ou a contingentia mundi et a priori,
à partir des essences.
Cette démonstration en fait repose sur le principe
de bonne fondation de la
relation μ pour la relation tout/partie. En effet
il nous semble que le nerf de
la démonstration est situé exactement dans ce
passage:
Mais la raison suffisante se doit trouver aussi dans les vérités
contin-
gentes ou de fait, c’est-à-dire dans la suite des choses répandues
dans l’uni-
vers des créatures; où la résolution des choses particulières
pourrait aller à
un détail sans bornes, à cause de la variété immense des
choses de la nature
et de la division des corps à l’infini. (§36)
Le caractère de bonne fondation consistait en ce dans le mouvement de
de-
scente infinie, il y ait un point d’arrêt, qui est précisément
l’existence d’uni-
tés substantielles, d’“atomes de la nature”. Ici la
descente infinie dans la re-
cherche d’une raison ultime doit s’arrêter et
elle s’arrête de par l’existence
d’une substance nécessaire qui contient éminemment la variété infinie.
La
différence est que cette substance nécessaire est “hors de la suite ou
séries
de ce détail des contingences” (§ 37). Cette première démonstration
a donc
la structure suivante. Il y a de l’ordre; l’ordre suppose une unité;
l’unité ne
peut être immanente à la diversité; donc il existe une raison de
l’ordre exté-
rieure à la diversité. Elle conduit un Dieu absolument
parfait et nécessaire
(on laisse de côté l’unicité de Dieu). Si nous
reprenons le fil de notre
esquisse plus haut, nous obtenons quelque chose
comme: si a est absolu-
ment parfait, a est absolument unifié, si a est
absolument unifié, a perçoit la
totalité de l’univers.
mis en avant avec beaucoup de force par Castaneda, celle de point de vue:
Une substance
individuelle a occupe un point de vue p sur l’univers; plus a
est parfaite,
plus le point de vue est global (il faudrait définir ce qu’est un
point de
vue local et un point de vue global avec des maximums et mini-
mums sur la
diversité et l’unité), si a est absolument parfaite, alors p dans
ce cas
est absolument global.
pose sur l’argument suivant: il faut qu’il y ait quelque chose de réel dans la
possibilité, fondé sur quelque chose d’actuel, Dieu. La première démonstra-
tion est fondée sur l’usage du principe de raison: il faut qu’il y ait une rai-
son de la diversité et de la contingence de l’univers; la seconde, elle, sur le
principe de contradiction: Dieu ne comportant aucune contradiction existe
nécessairement. C’est après cette doublé démonstration que Leibniz décrit
la production des choses:
Ainsi
Dieu est l’unité primitive, ou la substance simple originaire, dont
toutes
les Monades crées ou dérivatives sont des productions et naissent
pour
ainsi dire par des Fulgurations continuelles de la Divinité de moment
en
moment, bornées par la réceptivité de la créature à laquelle il est
essen-
tiel d’être limitée. (§47)
A. Robinet a insisté à propos de l’émanation leibnizienne sur un point
capi-
tal: elle n’est pas nécessaire, comme l’émanation spinoziste
(Robinet, Archi-
tectonique disjonctive, automates systémiques et idéalité
transcendentale dans
l’œuvre de G. W. Leibniz, Vrin, Paris, 1986, p. 432,
438). Il s’agit en quelque
sorte d’une émanation gracieuse, plus peut-être
que d’une “émanation suffi-
sante” (p. 439). Cette émanation est attestée
ailleurs, par exemple dans les
remarques sur Bayle:
il y a en Dieu non seulement la concentration, mais encore la source de
l’u-
nivers. Il est le centre primitif dont tout le reste émane et si
quelque chose
émane de nous au dehors, ce n’est pas immédiatement, mais par ce qu’il
a
voulu accommoder d’abord les choses à nos désirs (GP IV, p. 553,
1702).
Il a insisté à juste titre sur le caractère discontinu de la fulguration, qui
fait
de la création continuée quelque chose qui retient le caractère
discret de la
création première. Mais il faut également souligner ce qui
concerne la “ré-
ceptivité”. Ce concept a une longue histoire, qui a son
origine au moins
dans le Liber de causis, cet
anonyme platonicien médiéval qui contient une
proto-axiomatique
ontologique. Selon ce texte:
chaque chose reçoit de ce flux à la mesure de sa puissance et de son
être
(XIX, 157, 1990, pp. 68-69)
la diversité de la réception ne dépend pas de la cause première, mais du
re-
cevant (recipiens) (XXIII,
179, pp. 74-75).
Si la réceptivité de la substance dérivative borne les fulgurations, il en
dé-
coule effectivement de manière plus positive que la racine de la
diversité
dans la réception ne se trouve pas du coté du donateur, mais du
recevant.
On peut aussi souligner le terme “divinité” qui selon nous est
équivalent à
“déité”:
La divinité est aussi une unité du nombre des esprits et l’âme ou
l’esprit
en change est un échantillon de la divinité; car la divinité
représente
l’univers de source, en sorte que l’univers est tel qu’elle le
fait et s’accom-
mode à elle qui en est le germe ou l’origine. Et par
conséquent Dieu repré-
sente l’univers distinctement et parfaitement; mais
les âmes représentent ces
choses après coup, et s’accommodent à ce qui est
hors d’elles. (GP, VII, p.
556; Lettre à Sophie, 1700)
“Divinité” et “déité” ont en commun de désigner l’aspect impersonnel
du
principe, de l’unité primordiale.
Avant de revenir à l’interprétation du couple émanation-création, il
nous
faire une brève remarque sur le concept d’“émanation”. On a trop
souvent en
effet réduit la différence entre création et émanation entre un
aspect
personnel et un aspect impersonnel de la productions des choses,
alors que
la différence entre ces deux concepts est tout autant, ou peut-être
même
plus, d’ordre temporel. Pour les néoplatoniciens effectivement
la création est nécessaire, il n’y a pas de distinction entre le possible et
le
réel, l’Ineffable doit aller jusqu’au bout de sa manifestation
(Trouillard,
“Procession néoplatonicienne et création
judéo-chrétienne”,Mélanges
Trouillard , Les Cahiers de Fontanay, 19-22,
1981, p. 5).
Cependant la seule nécessité qui est alors invoquée est celle de la
“surabon-
dance de puissance” (ibid.). Les schèmes
génératifs retenus sont ceux du
cercle à partir de son centre, ou de la
production des nombres à partir de
l’unité, de la monade-principe (p. 9).
Un autre trait de l’émanation c’est d’e-
tre une “procession polycentrique”
(p. 19):
le centre est partout, et l’univers intérieur en chacun de ses points.
Tou-
jours total il est partout identique et cependant différent par le
déploiement
de la perspective. (ibid)
Le schème émanatiste et le schème expressif se rejoignent ainsi
presque
complètement:
il y a comme autant de différents univers, qui ne sont pourtant que les
per-
spectives d’un seul selon les différents points de vue de chaque Monade.
(Monadologie, § 57)
L’émanation ainsi entendue est le schème philosphique de la production
ra-
dicale; la création ne se situe pas sur le même terrain, c’est un
schème reli-
gieux qui dans l’augustinisme surtout vise à exalter la
grandeur du Créateur
surtout à des fins sprituelles. Leibniz retravaille et
transforme ce schème en
distinguant création des essences ou des possibles
et création des existen-
ces. C’est à propos de la nécessité morale de la
création des existences que
Leibniz réinterprète le schème religieux de la
création, effet de la bonté di-
vine. Mais comme l’a souligné Boutroux
(1970, pp. 91 et ss.) il faut distin-
guer un niveau exotérique, celui que
nous venons de mentionner et que
Leibniz n’emprunte sûrement pas pour des
raisons de prudence, mais parce
qu’il contient une vérité partielle, celle
de la générosité du principe, et un
niveau ésotérique qui est proprement
celui du mécanisme métaphysique. A
ce niveau, comme le déclare
Boutroux,
la nécessité morale du choix du meilleur semble sortir immédiatement de
la
nécessité métaphysique qui est la loi des essences (p. 92).
Nous avons donc montré que Leibniz n’a pas abandonné après 1695
l’idéal
normatif de métaphysique démonstrative. Les raisons pour lesquelles
on
constate effectivement un changement de style philosophique chez Leib-
niz
sont complexes, mais ne se laissent pas réduire à des raisons de pru-
dence
ou de stratégie discursive. La méthode euclidienne continue après
cette
date à jouer un rôle normatif, même si l’on ne retrouvera
plus
l’extraordinaire explosion logique de l’année 1679. Nous avons montré
de
plus que la Monadologie malgré les apparences (un
métaphysique pour
poète) contient des traces d’organisation axiomatique,
notamment avec les
opérateurs «il faut» et «il y a». Nous avons esquissé
une axiomatisation du
début du texte, après avoir rappelé le rôle central
de ce texte dans les tenta-
tives contemporaines de retour à une
métaphysique axiomatique, suivie de
quelques réflexions sur les
démonstrations centrales de l’existence d’un pre-
mier principe. Nous avons
enfin conclu en montrant l’éclairage que jettent
ces développements sur le
très difficile problème de la combinaison des
concepts de création et
d’émanation. L’hypothèse qui a guidé ce travail est
qu’il existe une
analogie de structure entre l’ordre axiomatique et le méca-
nisme
métaphysique de production de la multiplicité des monades à partir
de
l’unité suprême de la monade divine. Cette hypothèse est peut-être
trop
forte, dans la mesure où cette production défie toute approche
déductive
trop stricte - la fulguration n’est pas la dérivation d’un
théorème - mais
convenablement révisée elle nous semble décidément fournir
une des clefs
de la compréhension de la systématicité de la métaphysique
leibnizienne,
dans ses différentes expressions. Un résultat de ce travail
est aussi de re-
prendre la question des relations de Leibniz au
néo-platonisme de Proclus
sous un nouveau jour. Même si l’on ne peut
comparer en rien les vues sur
les mathématiques du diadoque et de
l’archiviste, il est frappant de consta-
ter sur des points de détail
l’accord sur les limites de la démonstration et le
rôle de l’axiomatique
dans une métaphysique.
Leibniz’s philosophy”, Leibniz’s ‘New System’ (1693), R. Woolhouse éd., Lessico Intellettuale Eu-
ropeo, LXVIII, Leo Olschki, Firenze, 1996, pp. 181-201.
dans l’oeuvre de Leibniz, Vrin, Paris, 1986. Cf. M. Serres: “je m’étais trompé, je l’avoue. La démon-
stration que j’ai tentée voici douze ans, de la systématicité leibnizienne me paraît toujours recevable
[...] j’avais imaginé la pyramide close” etc. (Préface à C. Frémont, L’être et la relation , Vrin, 1981, p. 7.
(in: Mathesis Universalis , 1969, Schwabe, Bâle, pp. 27-44); trad. anglaise: “The ancient axiomatic
theory” in J. Barnes, M. Shofield et R. Sorabji, éds., Articles on Aristotle. 1. Science , Duckworth,
Londres, 1975, pp. 50-64.
ments , 1925, pp. 29-45.
reprises des démonstrations par Proclus d’axiomes d’Euclide (par exemple les axiomes X, XII,
XIV du Libre I des Eléments ): “Hoc pronuntianum Proclus pulchre demonstrat hoc modo...” (p.
207), “Hoc Quoque Axioma Proclus egregie demonstrat hoc modo” (p. 208) etc.
sance Philosophy, 1992, p. 694 (l’oeuvre de Piccolimini est le Commentarium de certitudine mate-
maticarum disciplinarum, Venise, 1565). Sur ce thème de la fonction de l’imagination dans la pro-
duction des êtres mathématiques, cf. A. Charles-Saget, Mathématiques et philosophie dans l’oeu-
vre de Proclus , Belles Lettres, Paris, 1982, pp. 256 et ss.
Trouillard, Paris, 1965, p. 32. Ce commentaire de Proclus a été édité en grec en 1533, et traduit
en latin par F. Barozzi en 1560, il fut fort répandu tout au long du XVIIeme siècle et donc facile-
ment accessible à Leibniz. A. Charles-Saget compare les Eléments d’Euclide et les Eléments de
Théologie de Proclus: “chaque proposition se pose comme un théorème et l’enchamêment des
propositions se veut tel que chacune soit supportée par ce qui la précède et soutienne les proposi-
tions qui la suivant” ( op. ci t., p. 207). Cela dit, les Eléments de Théologie ne contiennent pas d’a-
xiomes au sens strict, ce qui tend tout de même à les rapprocher d’une épitome de théologie, d’un
vademecum de métaphysique plus que d’une exposition axiomatique à proprement parler. Si par
exemple nous lisons la proposition 1 (“Toute pluralité participe à l’un sous quelque mode”, op.
cit., p. 62) il est impossible de décider s’il s’agit d’un axiome ou d’un théorème. L’énoncé de la
proposition est suivi d’une glose, mais il est à son tour impossible de savoir avec une certitude ab-
solue si c’est une démonstration (la proposition serait alors un théorème) ou un simple commen-
taire (la proposition pourrait être alors un axiome). Le glose présente des traits de démonstration,
mais il faudrait examiner la structure logique des enchaînements de propositions la composant, ce
qui excède le travail présent. Pour une lecture détaillé cf. op. cit., pp. 210 et ss. A. Charles-Saget
(qui se réfère ici à une étude antérieur e de Stanislas Breton, “Le théorème de l’un dans les Elé-
ments de Théologie”, Rev. Se. Phil. Théol. 58-4, pp. 561-583) considère cette proposition comme
un “axiome justifié”, ce qui n’est pas sans poser des problèmes pour la nature de l’ordre axiomati-
que lui-même. A. Charles-Saget décèle dans cette proposition des axiomes implicites, comme par
exemple “rien ne peut être fait de parties qui ne sont rien” ( op. cit., p. 212).
duction du multiple à l’unité enveloppée dans le nombre a son modèle dans la réduction du mul-
tiple réalisée par la perception. Il y a un déplacement de la raison dianoétique des platoniciens à la
perceptio comme loi d’activité du sujet pensant (monade) des modernes, mais la thématisation
psychologique de l’origine de l’arithmétique et du nombre est proche. Cette détermination
psychologique subsistera dans la doctrine kantienne de l’énumération.
trant que son axiomatique de surface (explicite chez Wittgenstein) n’est pas isomorphe à son axio-
matique profonde, telle qu’une reconstruction la fait apparaitre en soumettant le texte à sa propre
loi. (P. Simons, Tractatus Logico Philosophicus, in: Wittgenstein Analysé , J.-P. Leyraz et K. Mulli-
GAN éds., Ed. Jacqueline Chambon, 1993, pp. 16-32. Pour une axiomatique de la notion de “per-
fection” chez Leibniz, cf. F. Nef, “La doctrine modale de Leibniz est-elle cohérente?”, L’actualité
de Leibniz , Actes de la Décade de Cerisy, 1995, à paraître in Studia Leibnitiana Supplementa.
montrer” (C 180).
se donner la liberté de les prendre tacitement pour accordées, sous prétexte que la chose est évi-
dente d’elle-même par l’inspection de la figure, ou par la contemplation de l’idée. A quoi je trouve
qu’Euclide, tout exact qu’il est, y a manqué quelque fois” (GP VII, 165-166, Préceptes pour avan-
cer les sciences ) .
une erreur, mais on ne sait pas forcément où; en métaphysique (privée des méthodes logiques), on
se sait pas s’il y a une erreur et a fortiori on ne sait pas où.
ces de raisonnement plus que sur des erreurs de principes; Arnauld lui par exemple soutenant
quela plupart des erreurs des philosophes sont des erreurs de principe.
l’utilisation d’axiomes secondaires et de théorèmes dans lesquels on retrouve des notions commu-
nes familères.
bridge University Press, 1995, chapitres 4 et 5.
currence il s’agit d’une hésitation sur “qui entre dans les composés”).
duation par le point de vue s’expose à une grave objection, dans la mesure où il repose sur un
exemple, un échiquier, où des vues peuvent être indiscernables quoique relatives à des points de
vue différents, qui n’est pas un bon analogon de l’univers, qui, selon Leibniz, contient suffisam-
ment de variété dans l’ordre, pour que des points de vue différents, effectivement découpent des
vues différentes - chaque site étant unique, singulier, à la différence des cases de l’échiquier, qui
sont identiques les unes aux autres, modulo leurs coordonnées spatiales.
University Press, 1985 parce qu’elle pose le problème de l’attribution à Leibniz de l’essentialisme
méréologique.
versity Press, 1983, pp. 26-38.
Terminus -- 〉 impossibile/possibile
Possibile -- 〉 non ens/ens
Ens -- 〉 abstractum/concretum
Concretum -- 〉 adjectivum/substantivum
Substantivum --) Attributum/suppositum Suppositum --〉 Phenomenon reale/substantia singularis. Cf. LH IV 7C Bl 105-106; VE
1298-1305, commenté dans Rutherford 1995, 105-111.
ces quelques pages par l’essentialisme méréologique (la thèse qu’un tout possède essentiellement
ses parties).
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